Membre de jury d'examen : sanction par le CNAPS impossible

3 mars 2020

Le membre d’un jury d’examen qui commettrait une infraction pénale à l’occasion des tâches conduites par ce jury peut-il être sanctionné par le CNAPS dans le cadre d’une procédure disciplinaire ?

Non ! C’est la réponse de la Commission nationale d’agrément et de contrôle à la question soulevée par une affaire, après avoir été saisie par un recours administratif préalable obligatoire.

En l’espèce, des contrôleurs du Conseil national des activités privées de sécurité avaient mené des opérations de vérification dans un centre de formation aux activités privées de sécurité, et constaté divers manquements imputables pour partie au centre et pour partie à un membre du jury. Aux termes des procédures de contrôle et disciplinaire, ce dernier avait été frappé par une interdiction d’exercer son métier d’agent de sécurité pendant plusieurs mois, par une Commission locale d’agrément et de contrôle.

Or, indépendamment de la réalité du manquement qui lui était reproché, il est apparu que l’administration n’avait pas le pouvoir de sanctionner l’individu dans le cadre de sa fonction de membre de jury, pour la simple et bonne raison que les textes qui régissent le fonctionnement du CNAPS – le Code de la sécurité intérieure – ne le permettent pas. Démonstration.

L’interdiction d’exercer décidée par l’administration reposait sur deux textes de loi, les articles R 631-2 et 4 du Code de la sécurité intérieure :

 

            « Sanctions.

Tout manquement aux devoirs définis par le présent code de déontologie expose son auteur aux sanctions disciplinaires prévues à l'article L. 634-4, sans préjudice des mesures administratives et des sanctions pénales prévues par les lois et règlements. »

 

            « Respect des lois.

Dans le cadre de leurs fonctions, les acteurs de la sécurité privée respectent strictement la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la Constitution et les principes constitutionnels, l'ensemble des lois et règlements en vigueur, notamment le code de la route et la législation professionnelle et sociale qui leur est applicable. »

 

La notion « [d’] acteurs de la sécurité privée » est définie à l’article R 631-1 du Code de la sécurité intérieure :

 

« Champ d'application.

Les dispositions de la présente section constituent le code de déontologie des personnes physiques ou morales exerçant des activités privées de sécurité.

Ce code s'applique à toutes les personnes morales dont les activités sont régies par le présent livre ainsi qu'aux personnes physiques dont les activités sont régies par les mêmes dispositions, qu'elles agissent en qualité de dirigeants de société, y compris d'associés ou de gérants, de personnes exerçant à titre individuel ou libéral, de salariés et stagiaires d'une entreprise de sécurité ou de recherches privées ou appartenant au service interne d'une entreprise. Ces personnes sont qualifiées d'acteurs de la sécurité privée. »

 

A la lecture de ces textes, on comprend que le CNAPS n’est fondé à sanctionner les manquements au « code de déontologie » qu’à l’égard des « acteurs de la sécurité privée » – c’est-à-dire les opérateurs de surveillance, gardiennage, transport de fonds, protection physique des personnes, protection des navires, enquêteurs privés et prestataires de formation à l’exercice de ces activités – et s’agissant du « respect des lois » que lorsqu’un manquement aura été constaté « dans le cadre de leurs fonctions ». Or tel n’était pas le cas en l’espèce, dès lors que l’individu en question avait agi dans le cadre de la participation bénévole à un jury d’examen.

 

Aussi, d’une part, il ne se trouvait pas dans la situation visée par l’article R 631-1 des « personnes physiques dont les activités sont régies par les mêmes dispositions, qu'elles agissent en qualité de dirigeants de société, y compris d'associés ou de gérants, de personnes exerçant à titre individuel ou libéral, de salariés et stagiaires d'une entreprise de sécurité ou de recherches privées ou appartenant au service interne d'une entreprise. »

 

Aussi bien, d’autre part, il n’agissait pas non plus « dans le cadre de [ses] fonctions » d’agent de sécurité limitativement désignées par sa carte professionnelle, ni en tant que « prestataire de formation » soumis au contrôle du CNAPS en vertu de l’article L 625-1 du Code de la sécurité intérieure :

 

« Est soumise au présent titre, lorsqu'elle est délivrée par des exploitants individuels et des personnes morales de droit privé, établis sur le territoire français, et n'ayant pas conclu un contrat d'association avec l'Etat :

1° La formation permettant de justifier de l'aptitude professionnelle à exercer les activités mentionnées aux 1° à 4° de l'article L. 611-1 et à l'article L. 621-1 ;

2° La formation permettant le renouvellement des cartes professionnelles mentionnées aux articles L. 612-20-1 et L. 622-19-1.

Les personnes mentionnées au premier alinéa du présent article sont dénommées " prestataires de formation ". »

La réglementation distingue les membres de jurys d’examen constitués en vue de l’évaluation de candidats à l’obtention d’un diplôme de professionnel de la sécurité, et les « prestataires de formation » qui dispensent un enseignement théorique et pratique à cette fin sous la forme « [d’] exploitants individuels » ou de « personnes morales de droit privé ». L’arrêté du 1er juillet 2016 relatif à la certification des organismes de formation aux activités privées de sécurité et aux activités de recherches privées dispose en effet à l’article 5.1 de son Annexe II :

 

« Le jury est composé, a minima, de deux personnes représentant les activités privées de sécurité concernées. […] Les membres du jury ne font pas partie de l’organisme de formation. Ils justifient, a minima, de deux années d’exercice professionnel dans le domaine d’activité concerné. »

Au total, l’administration ne pouvait donc pas légalement sanctionner l’individu interdit d’exercer pour des faits commis en qualité de membre bénévole d’un jury, fonction extérieure aux activités et personnes relevant de sa compétence disciplinaire.

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